Le monde de Juju

22 mai 2006

Julie cuisine

Ayant beaucoup de temps libre en ce moment, et bien décidée à devenir enfin "bonne à marier", j'ai décidé de prendre quelques cours de cuisine. Pas que je sois si nulle que ça mais... en fait c'est bien pire encore. Je me pointe donc à l'heure prévue dans le petit resto qui organise tout ça. Nous sommes une dizaine, quelques femmes mures, un papy, une bande de trentenaires et un jeune homme. Je me redresse, vérifie rapidement mon reflet dans un miroir mural. Ok ça va à peu près.

Le chef bedonnant nous invite à le rejoindre en cuisine. Aujourd'hui au menu: Gambas flambées! Hum... Moi qui n'aime pas les crustacés, c'est parfait... Enfin, comme on dit, fille à marier, jamais dépitée, je lance un grand miam aux alentours avec un regard alléché. Les plans de travail sont assez grands pour cuisiner en binôme. Chic chic chic! Je croise les doigts pour avoir droit à Quasi-Prince. Le chef nous répartit. Me voilà affublée d'une soixantenaire mal conservée bien que botoxée, trop bronzée et péroxydée. J'ai la nausée. Mais comme on dit : femme au fourneau, toujours dispo. Grand sourire et bise chaleureuse. Je l'adoooooore déjà.

Quasi-Prince se retrouve avec une des trentenaires, fraîche et souriante, enjouée et craquante. Bref une pouf. Qu'il regarde avec plus d'appétit que les ingrédients disposés sur nos tables. Début de la recette!

Nous devons tout d'abord couper un ail et lui enlever son germe. J'ai l'impression d'être une esthéticienne traquant les comédons rebels. Mamie Barbie et moi nous préoccupons, très concentrées, chacune de notre ail. Je finis par réussir à retirer le germe comme une pro. La tige blanche et gluante reste collée à mon doigt. Sourire en toute circonstance. Je commence à m'agiter comme une dégénérée pour le retirer. Rien à faire. Je secoue frénétiquement la main qui heurte la pile de casserole. Tout s'écroule dans un chahut on ne peut plus discret. Femme qui ramasse, toujours la classe! Je m'habille d'un sourire bien faux et me penche pour tout ramasser. Le fichu germe est tjs collé à mon index, je profite de ma position accroupie pour le coincer sous ma semelle. Ouf! Il reste forcément accroché à ma converse, mais après tout je m'en débarasserai dehors, c'est pas grave.

Deuxième étape : hâcher ail et persil ensemble. Je prends un couteau bien large et m'amuse à faire celle qui va poignarder tout le monde. Ca n'amuse que moyennement Mamie Barbie qui me fait une moue mi-gênée-mi-dégoutée. Ou peut-être est-ce un sourire. Difficile à dire, un muscle sur deux a laissé tomber l'affaire. Je me mets à hâcher de bon coeur en chantonnant. Dans un sens... Dans l'autre... Ce qui devait arriver arriva, je viens de me couper net un ongle fraîchement french-manucuré. Zut! Ce truc m'a coûté 50 euros. J'essaie de chercher mon bout d'ongle dans la persillade... Le chef me félicite de ma concentration, tout le monde se retourne et je feins celle qui hâche de tout son coeur. Ca y est! Voilà la victime de mon crime. Je jette discrètement le petit bout blanc dans la poubelle. Ni vue ni connue.


Ensuite
, faire chauffer l'huile à feu fort dans la poêle. L'huile se met à frémir, puis à bouillir grossièrement. Elle commence à grésiller puis à gicler un peu partout. Me voilà le visage recouvert de petits points d'huile bouillante. Femme brûlée, femme enjouée! Je m'essuie le visage dans mon tablier blanc en tissu. Une grande trace de fond de teint me zèbre le ventre, mon visage est rouge et luisant. Je commence à désespérer.


Quatrième étape : prendre les gambas et les jeter dans l'huile. Beuuuurk. C'est plein d'antennes, de pattes, d'yeux et tout ça. Je déteste les fruits de mer. Me voyant à deux doigts de vomir, Mamie Barbie retire vite les gambas et les jette dans la poêle. Je me ressaisis. Femme dégoutée, toujours emballée. Quasi-Prince s'approche de moi au ralenti et me regarde, me parle. Complétement ailleurs, perdue dans ses yeux (lequel est le plus joli?...), je ne comprends pas tout de suite ce qu'il me dit.
" - ... brûler.
- Pardon?
- Vos gambas sont en train de brûler!"
Mince!! Mamie Barbie s'est éclipsée pour dragouiller le chef, les gambas sont littéralement carbonisées.
" - Il ne faut pas faire autant chauffer l'huile.
- Oui mais je ne voulais pas qu'elles souffrent...
- ...
- ...
- Mais elles étaient mortes voyons.
- Oui mais vous savez, tout être a une âme et..."
Il tourne les talons et s'en va sans me laisser le temps de finir ma phrase. Femme prise pour une conne, jamais tu n'étonnes. Je retire la poêle du feu et la place sous le robinet d'eau froide. Pschhhhhhhhhhhhhh un immense nuage asphyxiant s'étale dans la pièce. Mes gambas sont noyées. Mes fringues sentent la friture. J'égoutte comme je peux les crustacés dans du papier essuie-tout et les jette à nouveau dans la poêle. Continuons.

Enfin, y verser l'ail et le persil... Ok... Mamie Barbie revient et prend un air halluciné en voyant les gambas. J'ai peur qu'elle reste bloquée avec les yeux exhorbités. Je lui souris. Elle me regarde d'un air morne. Voici le moment où il faut "verser le cognac et flamber hors du feu". Me connaissant, je prends peur. Mais Mamie dit craindre pour la paille qui lui sert de cheveux. Je me jette à l'eau. Je verse fébrilement le cognac et commence à flamber. Bon il ne reste plus grand chose à griller, mais ma belle flamme bleue fait l'admiration des autres élèves. Contente de cet instant de gloire, je fais celle pour qui c'est absolument normal. Les flammes commencent à lécher mon tablier. Les traces de fond de teint prennent feu. Je jette le contenu de la poêle sur Mamie Barbie qui se met à hurler, et je cours en rond dans la pièce en criant comme un boeuf. Femme allumée, jamais désespérée. Le chef court à ma rencontre et me jette à la figure l'eau contenant les épluchures de légumes. Le feu est éteint. Ma fierté aussi.

Je dégage les morceaux de pommes-de-terre de mon épaules, ramène ma mèche gluante sur le côté, et me dirige vers ma paillasse comme une princesse. Le chef nous tend à tous un doggy bag afin de pouvoir déguster tout ça chez soi. Génial... Je me tourne vers l'homme en blanc et lui demande d'un faux air enjoué "A quand le prochain cours?". Il ne m'a jamais répondu, me regardant d'un air outré. Je sors du restaurant, penaude, quand je vois Quasi-Prince remonter la ruelle. Je lui cours après et lui demande si ça l'intéresse de partager ce repas avec moi, j'habite pas loin et ça serait plus sympa... D'autant plus qu'il pourrait me réexpliquer quelques points de la recette... Mais il me répond que non, il n'est pas dispo de toute façon et il est très pressé. En effet je le vois rejoindre au coin de la rue Miss Pouf, 30 ans, bonne à marier.

Je rentre chez moi lentement, pas très motivée. Je grimpe les escaliers, ouvre la porte. Mon chat est là, miaulant à la mort. Forcément je n'ai plus rien dans le frigo à lui donner. Je jette un oeil à mon doggy bag, hésite... Est-ce que ca va le tuer?... Bof, faisons l'essai. Je verse le contenu carbonisé dans sa gamelle. Il renifle, recule d'un air désapprobateur et file se rouler en boule dans son lit rond, au salon. Je le suis, m'avachis sur le canapé, jette ma tête en arrière et étends mes jambes sur la table basse.

Tiens c'est bizarre, ça sent l'ail...

5 Comments:

Anonymous Anonyme said...

purée...
est ce possible ?
tu as legerement enjolivé le recit ?
ou c'etait la brute veritée ?

00:50  
Blogger Juju said...

lééééégèrement enjolivé ;-)

08:01  
Anonymous Anonyme said...

enfin, en tout cas, j'ai bcp ri !!!
et quasi prince, ben c'est qu'un pourri ! (oui, je sais, insulte peu convainquante, mais j'insulte peu !!!)

12:48  
Anonymous Anonyme said...

Ui quazi-prince n'a pas l'air effaré par ton savoir fair...Que fair? Miss Pouf a l'air bonne...A quoi deja? Cherche donc un principichi qui sache fair les souchi pour mslle chichi!!
Bonne sieste! N'oublie pas ton coloc est pres a degoubiller se que tu lui a refiler a bouffé!

13:21  
Blogger Juju said...

Bah mon chat vomi tout le temps de toute facon...

Je prefere laisser planer le doute... Je ne suis ptet pas la fautive

13:54  

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