Le monde de Juju

25 mai 2006

Cinéma cinéma cinéma Tchi tchaaaaaaaa

Je n'ai jamais trop aimé les jours fériés. Bon on peut faire la grasse mat', mais tous les magasins sont fermés, la ville est déserte (surtout vu le temps aujourd'hui) et on a droit à une rediff' de Beethoven 15 sur TFoune. Bwof (c'est un bof, mais en plus bof, un best of bof).

Donc au menu de la journée : un ciné. Pour la première fois de ma vie, je vais aller au ciné seule. Je fais donc un voeu en fermant les yeux très fort : ne jamais plus aller au ciné seule. Ca, c'est fait.

C'est donc sous la pluie, et à pied (les bus font grève les jours fériés) que je me suis rendue au ciné intimiste de ma ville. A côté des énorme complexes UGC, ce petit bouiboui fait fi de point de chute des films à petits budgets. C'est un vieux ciné aux fauteuils rouges, au velours râpé, qui sent bon le caramel et dans lequel il fait toujours trop chaud.

Je choisis au hasard un film dont l'affiche est plutôt jolie, une jeune fille aux jambes blanches est assise, ou plutôt posée, sur une chaise noire. C'est parti. Je prends mon ticket et grimpe les marches menant au premier étage. Une quinzaine de minutes plus tard, alors que nous sommes 5 dans la salle (dont un homme lisant le journal?!), le film démarre. Chuuuuuuut ...

Après un générique un brin long (environ 8 minutes) résumé en un plan fixe sur une fille se limant les ongles, je m'aperçois que le film est en roumain (ou quelque chose comme ça) sous-titré en bulgare (environ aussi). Je regarde autour de moi les autres spectateurs qui ne semblent pas le moins du monde surpris et hochent la tête au fur et à mesure du monologue.

Après une dizaine de minutes passées à essayer de piger le pitch, j'ai baissé les bras et suis sortie dans le couloir. Je descends acheter un gobelet de Sprite, et me cale contre les marches en contre-bas, celles qui font face à la vitre extérieure mais aussi aux toilettes. Point sécurisant. Dehors la pluie tombe violemment, le vent semble faire tomber les gouttes à l'horizontale. Un enfant passe, accroché énergiquement au bras de sa mère, et saute dans toutes les flaques qu'il croise. Plus loin, un chien s'ébroue à côté d'un papy qui se met à râler et qui continue son chemin en grognant et en prenant à parti des témoins que lui seul connaît.

Deux adolescentes survoltées manquent de me marcher dessus et se dirigent vers le cabinet de toilettes. Je n'ai jamais compris l'habitude des filles de cet âge (voire plus, je ne citerai pas de noms) qui consiste à aller aux toilettes par deux. Rituel social (han je t'aime bien, laisse-moi faire pipi à côté de toi!)? Peur de se perdre? De se casser un doigt en appuyant sur la chasse d'eau et avoir besoin d'une autre pour se rezipper? Ah mystère de l'adolescence... J'ai dû en louper quelques affres.

La vieille caissière, maquillée à la truelle, se tourne vers moi, lève son menton et me lance:
" - L'est pas bien le film?
- Je comprends pas le roumain
- C'est du tchèque
- Non plus..."
Elle se retourne, désintéressée, et reprend son tricot. Je ne sais pas combien de temps je suis restée là, à mâchouiller ma paille. Assez pour voir mes amis spectateurs sortir de la salle, époustouflés par la grandeur du film (enfin je crois, je sais pas).

J'attends que la pluie se calme un peu et tente une sortie. Le chien est toujours dans la rue, il renifle les semelles pressées des passants. J'erre dans quelques rues, tout à l'air endormi. Je passe acheter un chausson-franboise dans une boulangerie ouverte et m'asseois sur un banc, dans le parc du centre ville. Mes chaussures sont revouvertes de boue, mais ça ne me dérange pas. Ca me rassure même.

L'acalmie semblant déjà terminée, je me lève et presse le pas vers mon appart', où des vêtements secs et un bon thé chaud m'attendent. J'en frissonne de plaisir. Et, en prenant soin de bien marcher dans chaque flaque d'eau, je parcours le peu de chemin qu'il me reste avant de retrouver mon confort quotidien. Il n'y a rien de meilleur qu'écouter la pluie tomber dru lorsqu'on est bien au chaud chez soi. Sauf peut-être l'écouter à deux...

Enfin si un jour, accompagnée, mon passe-temps préféré est d'écouter la pluie plutôt que l'autre, je me poserai de sérieuses questions. Ah les paradoxes féminins...

3 Comments:

Anonymous Anonyme said...

Bonjour douce Julie...
L'épreuve du cinéma seule, je l'ai affronté, il y a peu... quand ce kinepolis a choisi de se dresser devant mon immeuble...
Maintenant, j'y arrive, meme avec plaisir
seul soucis, j'aime bien parler de mon avis sur le film, alors je m'arrange pour connaitre des gens qui ont vu, ou vont voir le meme film que moi, histoire d'echanger nos avis

Savoir que l'on est pas seul à vivre face a sa solitude, c'est toujours ca de pris, mais ca ne change rien...
mais je te le dis qd meme : moi ca me rends moins seule de savoir qu'on est plusieurs a vouloir vivre a deux...

12:37  
Anonymous Anonyme said...

Cela ressemble grandement au tragedie grecs...Sauf qu'on n'est pas grecs. M'enfin,j'aurai preferé voir le film et interprété les images a ma facon plutot que de sortir et me rappeler combien ma vie est mortelemen ennuyante. Tu penses tout de meme pas que principichi s'y trouver? Peut etre aux toilettes des hommes! Quelle poisse! *claque des doigts* Tu l'as loupé!
Ce sera pour la prochaone fois
*croise les doigts*

13:53  
Anonymous Anonyme said...

Je veux juste dire que j'ai aimé lire cette note! ;) Si tu me permet le tutoiement; t'ecris bien, en tout cas c'est mon ressentit lorsque je l'ai lu.

02:09  

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